Compétition officielle ou le choc des egos

Loin des sourires de circonstance et des paillettes, Compétition officielle porte un regard plein d’autodérision sur le cinéma. En s’appuyant sur un trio d’acteurs talentueux, il dépeint un monde où s’entrechoquent les egos.

Claire Brugier

Le7.info

Pour assurer sa postérité, un magnat de l’industrie pharmaceutique hésite -pas longtemps et pas vraiment- entre bâtir un pont et… financer un film inoubliable. Ce sera la seconde option. Il achète donc à un prix astronomique les droits d’un livre qu’il ne lira jamais et confie la réalisation à la célèbre cinéaste Lola Cuevas (Penélope Cruz) dont il n’a jamais vu les films. Compétition officielle, le dernier-né des films de Mariano Cohn et Gastón Duprat, plonge dans les préparatifs de ce tournage de commande, aux côtés d’une réalisatrice sûre de son art et de deux acteurs principaux non moins convaincus de leur talent. Le choc des egos est inéluctable. Comment Félix Rivero (Antonio Banderas), un comédien adulé par Hollywood, et Ivan Torres (Oscar Martinez), un fameux acteur de théâtre fier de ne pas l’être, pourraient-ils s’entendre ? Le pari de Lola Cuevas est risqué, celui de Mariano Cohn et Gastón Duprat tout autant. A filmer l’excès ils auraient pu y succomber, se laisser happer par la mégalomanie ambiante qui se reflète ici et là dans des miroirs, des psychés, des écrans.

Les deux réalisateurs signent au contraire un scénario tout en finesse, à la fois drôle et sans complaisance. Débordant d’auto-dérision, le film interroge le monde du cinéma et son rapport au réel mais aussi la direction d’acteurs, le rôle des artistes, leur relation au public, aux médias, leur travail d’interprétation, leurs caprices… Tout y passe ! Dans cet envers du décor ultra-graphique et déshumanisé, ni flashs ni paillettes. Les flèches verbales que s’envoient les personnages ricochent contre des murs froids et rectilignes, dans des espaces trop vastes et désespérément vides. Etre le meilleur, coûte que coûte… Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé n’est assurément pas fortuite. Le spectacle n’en est que plus savoureux, moins âpre qu’acidulé. Juste délicieux.

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